Changement de classe !

Ca s'arrose !
   Gastéropode ?        Ça s’arrose !

Des squelettes humains préhistoriques, longtemps attribués à des hommes, ont été récemment ‘requalifiés’ en squelettes de femmes.

Il s’agit notamment du squelette humain Magdalénien découvert par Marcel Blanchard en 1934 dans la grotte de St Germain la Rivière (Gironde, France), attribué à un homme, qui vient de faire l’objet d’une révision de sexe.  La conclusion de l’étude (voir biblio) menée en 2002 indique : « Cela signifie que, si le dimorphisme sexuel des populations du Paléolithique supérieur ne diffère pas de celui de l’ensemble des populations actuelles, ce qui est vraisemblable en raison de leur identité taxonomique, le spécimen de Saint-Germain-la-Rivière est statistiquement féminin avec un risque d’erreur négligeable. Le réexamen des os coxaux du squelette de Saint-Germain-la-Rivière selon deux méthodes, la première morphologique, la seconde morphométrique dont la fiabilité très élevée a été testée par ailleurs confirme de manière certaine I’attribution de ce spécimen à une jeune femme adulte ».  

     Squelette Magdalénien – Saint Germain la Rivière
     Dame du Cavillon – Musée de l’homme

 

 

 

 

 

 

 

En 1872, un squelette humain complet, en bon état de conservation est exhumé par Émile Rivière dans la grotte du Cavillon aux Baoussé-Roussé, à Grimaldi (Italie). Il présente plus de 200 coquillages sur le crâne, qui proviendraient d’un vêtement dont le tissu se serait dissous ou d’une parure de tête. Son corps est recouvert d’un colorant rouge, l’hématite, accompagnant le rituel funéraire. Ce squelette plutôt grand a longtemps été attribué à un homme, avant que les chercheurs ne s’aperçoivent qu’il s’agissait en fait d’une femme ! L’étude (voir biblio) qui a été menée en 2014 signale : « Le crâne est globalement gracile : insertions musculaires pariétales, occipitales et temporales relativement peu marquées, région bregmatique peu saillante tout comme les arcades sourcilières. Ces particularités, associées à un front vertical, des bosses pariétales marquées, un palais étroit, permettent de supposer qu’il devait appartenir à un individu de sexe féminin ».

Passer du statut d’homme à celui de femme est certes significatif mais c’est un simple changement de genre ! Que dire d’un mollusque qui grâce à l’étude de Jacques Le Renard et Jean-Michel Pacaud menée et publiée en 1995 passe du statut de bivalve/pélécypode où l’avait rangé M. Cossmann dans son iconographie de la fin du XIXème siècle à celui de … gastéropode !

Promotion ? En tous cas, au vu de la classification scientifique des espèces, ce n’est rien moins qu’un changement de Classe ! Excusez du peu.

C’est l’histoire que nous contait Didier Kauffmann, ancien membre de l’équipe Grignon, en 2005 dans un article publié en interne au club :

LES GASTEROPODES BIVALVES, UNE CURIOSITE DE LA NATURE
 
« On peut être parfois surpris des solutions adoptées par la nature pour protéger un organisme et des convergences de forme qui en résultent, il en est un exemple dans le Groupe des Mollusques avec les Gastéropodes bivalves.
Berthelinia (Squamulinia) squa-mula en extension, vu du côté gauche et de dos.
Im: insertion du muscle adducteur sur la valve gauche (d’après Kawa-gutti et Baba).
Comme on peut le constater il s’agit d’un mollusque dont les parties molles sont celles d’un gastéropode et dont la coquille est formée de deux valves le faisant ressembler à un pélécypode.
Plusieurs genres de mollusques présentent de telles caractéristiques ; nous nous intéresserons plus particulièrement au genre Berthelinia dont une espèce fossile est présente à Grignon à savoir Berthelinia (Squamulinia) squamula qui figure dans l’Iconographie de Cossmann et Pissarro sous le numéro PE 83-1 mais qui est désormais classée GA 243 Bis 3 selon les préconisations de Jacques Le Renard et Jean-Michel Pacaud, du Muséum National d’Histoire Naturelle, parues en page 66 du Tome 3, numéro 3 de la Revue Cossmanniana en Mai 1995.
           
Cossmann décrit une coquille équivalve, lisse, très mince, inéquilatérale dilatée en arrière et arrondie en avant avec des crochets très petits et dont seule la valve droite porte une petite dent obsolète. Quant aux impressions musculaires et du manteau elles sont très peu précises. Toutefois Cossmann avait un doute sur cette coquille classée dans les bivalves. En effet il a écrit « Si je n’avais étudié les deux valves de cette singulière coquille j’aurais pu croire qu’il s’agissait d’un gastéropode ».
Toutefois en dehors de sa rareté et de cet aspect très particulier intérêt principal des représentants de la famille des Juliidae réside dans les conclusions paléoécologiques que l’on peut en tirer : en effet les représentants actuels des Juliidae ont un biotope bien précis et très particulier puisqu’il s’agit d’une association très stricte avec des algues du genre Caulerpales, algues célèbres depuis qu’elles ont entrepris de coloniser la Méditerranée. Par ailleurs les Juliidae ont des exigences écologiques spécifiques : il leurs faut une température minimum de l’eau de 25°C, une salinité stable et de valeur normale, il leur faut aussi une eau bien oxygénée et par ailleurs on ne les trouve jamais à plus de 2,5 mètres de profondeur. Toutes ces caractéristiques permettent lorsque l’on trouve à l’état fossile l’une de ces coquilles d’en déduire de précieux enseignements sur le faciès écologique du niveau dans lequel on se trouve ».
 
Références bibliographiques
– COSSMANN et PISSARRO, Iconographie complète des coquilles fossiles de l’Eocène des environs de Paris (1904-1913).
– COSSMANNIANA Bulletin du Groupe d’Étude et de Recherche Macrofaune Cénozoïque Tome 3, numéro 4 Décembre 1995
– Gaspard GUIPERT*, Henry de LUMLEY**, Marie-Antoinette de LUMLEY*Gaspard GUIPERT*, Reconstruction du crâne Barma del Caviglione (Dame du Cavillon), Baoussé-Roussé, Grottes de Grimaldi in Researchgate – 2014
– D. Henry-Gambier, Jaroslav Brůžek., P. Murail, F. Houët, Révision du sexe du squelette Magdalénien de Saint-Germain-la-Rivière (Gironde, France) in PALEO Revue d’Archéologie Préhistorique, Société des amis du Musée national de préhistoire et de la recherche archéologique – SAMRA, 2002

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