De nombreux et éminents scientifiques sont venus dans la falunière de Grignon. En voici quelques-uns, leur nom est suivi de la date de parution des descriptions de fossiles qu’ils ont découverts à Grignon :
Solander 1766, Bruguière 1792, Lamarck 1801 à 1818, Defrance 1816 à 1823, Deshayes 1824 à 1865, Michelin 1828, Caillat 1835, D’Orbigny 1850, Bayan 1870 et 1873, De Boury 1883 et 1899, Cossmann 1885 à 1913, De Raincourt 1885, Grabau 1904, Pezant 1909
Sans oublier Cuvier et Brongniart qui y ont également travaillé dès 1802.
Sommaire ** Jean-Baptiste Lamarck ** Georges Cuvier ** Congrès international de Géologie 1900 ** Congrès international de Géologie 1980
Jean-Baptiste, Pierre Antoine de Monte, Chevalier de Lamarck (1744-1829)
Jean-Baptiste de Lamarck étudie la médecine et la botanique. Grâce à l’appui de Buffon il entre à l’Académie et occupe différents postes au Jardin du Roi. Après la révolution il devient professeur de zoologie au Muséum, chargé de l’étude des insectes et des vers qu’il baptise « invertébrés » et établit une méthode de classification qui sera adoptée par tous les naturalistes.
Il s’intéresse aussi à la paléontologie. Dans ses « Mémoires sur les fossiles des environs de Paris » il décrit plus de 500 espèces fossiles du tertiaire et met en évidence une trentaine d’espèces dont le rapprochement avec des espèces vivantes « analogues » est indiscutable, concluant à la complexification de la vie et à la transformation continue des espèces au cours du temps.
"La lime fossile dont il s'agit ici, et que j'ai trouvée à Grignon, est en tout semblable à celle que j'ai reçue de M. de Labillardière, mais elle est beaucoup plus petite. Ainsi voilà parmi les fossiles de Grignon encore l'analogue d'une espèce qui vit actuellement dans la mer des Indes et près de la Nouvelle Hollande." Article 'Lima fragilis' in "Mémoires sur les fossiles des environs de Paris" - extraits des annales du MNHN (1823).
Le Transformisme part du postulat, aujourd’hui démontré, que des espèces voisines doivent avoir une même origine. Issues d’une même souche, elles ont peu à peu divergé dans le temps.
C’est la » chaîne Lamarckienne » : le vivant est « activement » modelé par les conditions écologiques. Les modifications acquises sont ensuite conservées par la descendance :
« Tout ce que la nature a fait acquérir ou perdre aux individus par l'influence des circonstances dans lesquelles leur race se trouve depuis longtemps exposée, et, par conséquent, par l'influence de l'emploi prédominant de tel organe ou par celle d'un défaut constant d'usage de telle partie, elle le conserve, par la génération, aux nouveaux individus qui en proviennent, pourvu que les changements acquis soient communs aux deux sexes, ou à ceux qui ont produit ces nouveaux individus.» Lamarck "Philosophie zoologique, ou Exposition des considérations relatives à l'histoire naturelle des animaux". (1809)
De même Lamarck croit que la ‘fonction crée l’organe’ :
"Les naturalistes ayant remarqué que les formes des parties des animaux, comparées aux usages de ces parties, sont toujours parfaitement en rapport, ont pensé que les formes et l'état des parties en avoient amené l'emploi: or, c'est là l'erreur ; car il est facile de démontrer, par l'observation, que ce sont, au contraire, les besoins et les usages des parties qui ont développé ces mêmes parties, qui les ont même fait naître lorsqu'elles n'existaient pas, et qui, conséquemment, ont donné lieu à l'état où nous les observons dans chaque animal. Lamarck "Philosophie zoologique, ou Exposition des considérations relatives à l'histoire naturelle des animaux". (1809)
C’est dans un climat de scandale, (un géologue n’a-t-il pas écrit que les idées de Lamarck était une « spéculation barbare et absurde »), que le Transformisme finit par s’imposer.
Le scandale atteindra son comble lors de la publication de l’ouvrage de Darwin “ L’Origine des Espèces ”.
Velin n°12/52 – Cerithium giganteum — que Lamarck fit réaliser par le peintre Oudinot à partir de la collection de fossiles de Grignon appartenant à J.Defrance – collection MNHN.
A noter le pessimisme de Lamarck sur la nature humaine :
"L’HOMME, PAR SON ÉGOÏSME TROP PEU CLAIRVOYANT POUR SES PROPRES INTÉRÊTS, PAR SON PENCHANT A JOUIR DE TOUT CE QUI EST A SA DISPOSITION, EN UN MOT, PAR SON INSOUCIANCE POUR L’AVENIR ET POUR SES SEMBLABLES SEMBLE TRAVAILLER À L’ANÉANTISSEMENT DE SES MOYENS DE CONSERVATION ET À LA DESTRUCTION MÊME DE SA PROPRE ESPÈCE.[…].NEGLIGEANT TOUJOURS LES CONSEILS DE L’EXPERIENCE, POUR S’ABANDONNER A SES PASSIONS, IL EST PERPETUELLEMENT EN GUERRE AVEC SES SEMBLABLES ET LES DETRUIT DE TOUTES PARTS ET SOUS TOUS PRETEXTES […].ON DIRAIT QUE L’HOMME EST DESTINÉ À S’EXTERMINER LUI-MÊME APRÈS AVOIR RENDU LE GLOBE INHABITABLE". Lamarck, "Système analytique des connaissances positives de l'Homme" 1820
Georges CUVIER (1769-1832)
Georges Cuvier prit goût à l’histoire naturelle en recopiant pour son plaisir les illustrations de Buffon. A 26 ans il est le plus jeune membre de l’Académie des Sciences. Professeur au Collège de France, puis au Muséum, ses observations sur les groupes d’animaux les plus divers l’amène à formuler les principes anatomiques.
Il fut le premier naturaliste capable de noter les corrélations unissant entre eux divers organes d’un même être et d’établir les correspondances d’organes d’un être à l’autre. Cette méthode comparative, appliquée au squelette allait permettre de reconstituer les vertébrés disparus.es fondamentaux et à fonder l’anatomie comparée.
Il apparaît comme le fondateur de l’anatomie comparée et la Paléontologie des vertébrés devint une véritable science.
Mais s’il fut le premier à reconnaître la parenté entre les espèces vivantes, pour Cuvier les espèces sont immuables et leur apparition unique et spontanée, ce qui revient à nier l’évolution, d’où le nom de Théorie de la Préformation et Fixiste. Cette théorie coïncidait avec le discours Biblique en vigueur à l’époque et la thèse du Déluge : d’ailleurs l’un des disciples de Cuvier, Louis Agassiz (Paléontologue né en Suisse et installé aux Etats Unis) considérait même le monde vivant comme la réalisation d’un plan divin. et disparues, il en nia toujours la filiation directe et expliqua les disparitions par des remaniements géologiques et une succession de grandes catastrophes.
"Des êtres vivants sans nombre ont été les victimes de ces catastrophes, les uns ont été détruits par des déluges, les autres ont été mis à sec dans le fond des mers subitement relevé : leurs races même ont fini pour jamais, et ne laissent dans le monde que quelques débris à peine reconnaissables pour le naturaliste". Cuvier "Recherches sur les ossements fossiles de quadrupèdes" Tome 1 page 10 (1812).
Paradoxalement, les travaux de Cuvier vont servir de base aux théories Transformistes qui allaient s’imposer avec Lamarck en dépit de la violente opposition de Cuvier et de l’Université britannique dominée par le Catastrophisme. Lire l’article de Goulven Laurent paru dans la Recherche n°183 décembre 1986 ‘Cuvier et Lamarck : la querelle du catastrophisme‘.
Cuvier est à l’origine de l’appellation « jurassique » pour définir une période de l’ère mésozoïque. Il est le créateur avec Brongniart de, ce qui semble bien être, la première carte géologique du Bassin Parisien :
« Géognosie des terrains de Paris » : coupe de Grignon à Paris parue en 1811 dans « Essai sur la géographie minéralogique des environs de Paris » par Cuvier et Brongniart. En rose, la craie ; en rouge, l’argile plastique et le sable ; en jaune, le calcaire marin grossier et à cérithes.
Les Congrès Internationaux de Géologie
1 – 1900
Le 22 août 1900, lors du VIIIème Congrès International de Géologie qui s’est tenu à Paris dans le cadre de l’Exposition Universelle, plus de 70 éminents géologues sont allés en excursion à Grignon sous la conduite de Stanislas Meunier – titulaire de la chaire de Géologie au MNHN de 1892 à 1920, Maître de conférences de géologie, à Grignon- pour récolter des fossiles et étudier le site. L’arrivée se fit par le train à la Gare de Plaisir-Grignon construite pour l’occasion.
On peut lire sous la plume de Stanislas Meunier (A gauche son portrait réalisé par Antoine Lecomte de Noüy – source Wikipedia) le compte rendu de ce Congrès paru dans les Annales de Grignon en 1901 ou cette autre version parue dans le Cahier des Naturalistes de 1902. Extrait de cette version de 1902 :
« Les travaux (du congrès) ont consisté en séances dans lesquelles on a échangé des idées, des projets et des résultats de travaux et aussi en excursions où l’on a été étudier des gisements spécialement dignes d’intérêt. Chargé de diriger l’une de ces promenades, j’ai choisi la localité de Grignon qui remplit, en effet, toutes les conditions requises. Il n’y a, comme on sait, aucune exagération à dire que le parc de Grignon est illustre dans le monde entier à cause de son incomparable gisement de fossiles appartement aux niveaux inférieur et moyen du calcaire grossier. Et l’on peut constater la célébrité du lieu rien qu’au nombre de mes compagnons de promenade qui dépassait 70 et à leur qualité qui comprend les maîtres de la science dans les pays les plus divers….
…On aurait du reste pu conclure le succès de la journée du volume seul des collections recueillies par les excursionnistes, et il est agréable de penser qu’à l’heure actuelle, des milliers de coquilles, prises en même temps dans les gisements grignonnais, se sont dispersées dans les Musées géologiques et paléontologiques du monde entier. » Stanislas Meunier – Cahier des naturalistes de 1902
Relation du déroulement et programme complet de ce VIIIème Congrès International de Géologie sous la plume O. Puche Riart, L. F. Mazadiego Martínez and P. Kindelán Echevarría – 2008 – disponible sur le site de Researchgate.
2 – 1980
En Juillet 1980, lors du 26ème Congrès International de Géologie (1er centenaire – le premier Congrès International eut lieu à Paris en 1878) qui s’est tenu à Paris, une plaquette sur Grignon rédigée par Yolande Le Calvez et Jacques Le Renard a été éditée à l’attention des participants.
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